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Alfred Georgres REGNER, peintre graveur

Le cheval à bascule
Lettre à M.X.

Fontainebleau, le 21 octobre 1947

Monsieur,
Je suis parfaitement d’accord avec vous sur l’aspect décoratif de mon ensemble. C’est seulement par le voisinage des autres exposants que je m’en suis aperçu. Dans mon atelier, je ne m’en rendais pas compte. Je lutterai à l’avenir contre cet écueil. Je pense que c’est en cherchant à me débarrasser de mon réalisme (j’ai été sociétaire du Salon des Artistes Français) que je suis tombé dans cet excès.
Sentimentalisme dites-vous. Oui, mais à la GREUZE. Sous cet aspect anodin par la psychanalyse, on peut découvrir un érotisme censuré. " Le cheval à bascule " donne l’idée de balancement, d’avances et de reculs, de frottements. La forte personne blonde tient la queue du cheval dans sa main droite, pour que le symbolisme soit complet. De la main gauche, elle caresse deux gros grains de son collier. Le mouvement de sa cuisse est également révélateur. Le petit garçon a les orteils en éventail comme lorsqu’on lance son venin. Enfin la personne blonde n’a pas de coiffe sur la tête, elle n’est plus innocente. Le petit garçon par contre possède un chapeau (symbole de son pucelage), chapeau en papier donc peu solide pouvant se déchirer prochainement. La couleur est en noir, ce qui fait penser à des amours incestueuses soit avec une grande sœur soit avec une jeune maman. Vous voyez que le contenu latent de cette peinture est assez risqué. Je suis heureux que tout soit assez dissimulé, je ne veux pas tomber dans la littérature. Je vous remercie bien vivement pour votre bienveillance dans laquelle je puiserai un puissant stimulant pour mes recherches picturales. Peut-être que j’arriverai grâce en partie à vous à obtenir un certain résultat
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