Les
cent actes divers que REGNER nous propose en ses toiles pourraient
faire penser à une suite quelque peu fantastique de fables, mais
alors que la fable nous apporte sa conclusion en une moralité,
l'œuvre de REGNER nous retient suspendus dans l'équilibre
fallacieux et précaire d'un présent provisoirement
figé dans une anxieuse interrogation. Il ne conclut pas mais
nous implique dans une situation dont nous sentons qu'elle se
dénouera irrémédiablement (diablement, il faut le
dire), dans un futur immédiat. Le balancier, un instant, s'est
arrêté; ses personnages, pas tellement terribles, et oints
parfois d'une certaine jovialité goguenarde, vaquent
tranquillement à leurs occupations.
Nous commençons par suivre leur manège d'un œil
amusé mais, tout doucement, une sourde inquiétude
s'insinue en nous. La scène paraît cependant empreinte
d'un chaud confort, vêtue de couleurs enchanteresses et les
monstres-acteurs semblent s'accorder avec de pures figures
féminines en un monde provisoirement harmonieux. Cependant, nous
sentons bien qu'il suffirait du moindre déplacement de ligne ou
du moindre geste pour que le balancier se remette en marche et que les
monstres sortent les crocs et griffent pour nous déchirer ou
sécrètent quelque gluante et urticante substance capable
de nous digérer ou de faire fondre à blanc notre intime
personnalité comme par une tunique de Nessus.